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Poèmes de Sophie Javel
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Toile
de soie au sol étendue, le tracé du pinceau sûr et lisse marque l'élément,
organe, peau, voile, vêtement – de chair ou d'apparat ? - avant la vie.
Avant l'assemblage voile et fer qui donne forme et sens, le rythme
associant, la courbe musicale.
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Le cortège
s'avance, festival d'écorchés aux âmes à nu, quintessence des ombres
portées loin, vers la pureté. D'abord l'envol signe d'une aile candide,
femme délicatement voilée, sursaut d'un vêtement habile dans le vent, grâce
des mouvements d'une danse esquissée. Vert comme un sylphide printemps.
L'abstraction s'ensuit, entre corps et idée de corps, entre corps et
essence sans corps... Les membres se désarticulent, forcent leurs poids,
brisent la trop tranquille anatomie.
L'écorché
massif surgit, insondable de gouffres et d'attaches, de plis et de remous,
d'artères et de passages. Veines, muscles, os, circonvolutions acharnées
de 1'esprit clair, il est l'ombre qui livre et transmet à travers l'espace,
dedans vu dehors avec ses affres et ses réseaux. Ses convulsions et ses
échanges. Ses vides et ses mystères.
Son
sang semble circuler, vers l'expression aérienne d'un être sans peau, réduit
aux palpitations survivantes: souffle de bronches et léger flottement, le
sang est à peine liquide, et s'évanouit...
Pour
le voile nuageux, évaporé, d'un ultime sillage.
Silence
des âmes.
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Mirage
d'une chimère aux fils blonds, aux couleurs virevoltantes, au corps agile,
face aux tissus comprimés d'un essentiel rouge, d'un essentiel bleu, d'un
essentiel noir, froissés concentrés en étroits tissages de sens et de
flux.
Association
et paradoxe de fulgurances incarnées de souffle et d'être, entre chair et
esprit, recherche d'espace et découverte du sens, entre sculpture en
mouvement et esprit d'essence.
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Les
ramifications de l'arbre sont seules pleines et vraies.
A
la fois haut et bas, sol et ciel, l'arbre puise et relie,
accueille,
délivre.
A
la vue de l'arbre coulant.
Entremêlement
de racines devenues branches et troncs, myriades d'éclats tombant en pluie,
prisme et miroir. L’humus est là, et le bois avec lui. Et la feuille qui
se love, et pare tout l'ensemble : la liane, la mousse, l'univers foisonnant
d'une jungle de doutes et de maux, de sources. Richesses infinies.
Sculpter
l'arbre qui les incarnent tous, à la fois dessin, couleur, pression,
articulation, armature et liberté dans le vent. Prise de possession d'un
espace vertical familier, ascendant pour le regard, qui descend en racines
au dehors : rareté de la vision. Car le flux qui abreuve retourne vers
l'intérieur, alimente le chant interne.
Arbre
vu du dedans, ainsi il est comme tous.
Tel
un saule aux allures pleureuses, mais aux pieds sans attaches, l'arbre plane
en une idée essentielle.
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